Dans le cadre des protections sociales sacralisées après-guerre, la Sécurité Sociale reste un pilier majeur ancré dans l’esprit des citoyens, toutes catégories sociales confondues.
Ceci concerne d’abord et à court terme et dans la vie de tous les jours, la Maladie, dont les hôpitaux, les services d’urgence, la médecine de ville, et les médicaments sont les outils principaux et qui ont été tant sollicités lors de la pandémie de Covid. Ce poste qui représente plus de 170 Mds est soumis depuis des années à une érosion de ses moyens, sans compter les déserts médicaux de la médecine libérale. On ne compte plus les études et propositions partielles qui ont été avancées et même appliquées, sans qu’une remise à plat concertée de l’ensemble du dispositif n’ait été entreprise. Entretemps le système continue de fonctionner cahin-caha, car il est soumis au jour le jour à l’obligation même de fonctionner. Tout reste donc à faire, mais les solutions existent et elles sont plus d’ordre pratique et technique qu’idéologique.
Il en va tout autrement des Retraites, qui représentent un enjeu de 330 Mds avec les complémentaires, soit près de 14% du PIB, dont 120 Mds pour la Sécurité Sociale, et qui concernent d’une part et au jour le jour les bénéficiaires retraités au niveau de leurs pensions et donc leur pouvoir d’achat, et d’autre part l’ensemble du reste de la population au niveau de leurs attentes et par rapport à leur horizon de vie. C’est en cela que le sujet devient plus politique sinon idéologique.
Le gouvernement, au début du précédent mandat présidentiel, avait tenté de modifier structurellement le système en proposant avec courage une organisation « à points » sur le modèle suédois, tout en fusionnant les 42 régimes de retraites en un seul. Cependant, après un début prometteur, la réforme a été progressivement mise en pièces, par l’impréparation manifeste, sinon plus, du « Haut Commissaire aux Retraites » (impliqué par ailleurs dans des activités parallèles non déclarées), par les coups de boutoirs de certains régimes spéciaux, par les avocats et leur caisse autonome, et enfin et surtout par la volonté malvenue de vouloir imposer en cours de réforme un « âge pivot » de 64 ans, La pandémie de 2020 a permis de mettre officiellement la réforme au placard.
Mais voilà qu’au cours même de la campagne du second tour de 2022, le Président a annoncé la reprise de la réforme de retraites et évoqué un âge de 65 ans pour l’ouverture des droits à taux plein. Cet âge a toujours constitué un « marronnier » de la vie politique en France et un chiffon rouge pour les syndicats et désormais pour l’ensemble des salariés. Alors pourquoi s’obstiner ?
Le droit à la retraite au taux plein en France est conditionné par l’âge d’ouverture des droits ET par la durée de cotisations désormais fixée a 43 ans par la réforme Touraine de 2014. Il faut supprimer la notion d’âge d’ouverture des droits !
Une retraite basée sur la seule durée de cotisations :
- Est plus juste car elle s’applique à tous, avec logique, car fonctionnant sur les principes de toute assurance,
- Elle résout automatiquement le problème de carrières longues en permettant à un salarié ayant commencé de travailler à 16 ans de prendre sa retraite 59 ans,
- Elle résout accessoirement le problèmes de la pénibilité car celle-ci concerne principalement les carrières longues,
- Elle rend politiquement plus acceptable l’intégration dans le système des divers régimes plus ou moins spéciaux sinon spécieux,
- Elle facilite la résolution de l’équation financière en modifiant la durée de cotisation pour tous de façon plus acceptable.
Alors pourquoi hésiter, pourquoi s’accrocher à de vieilles lunes au risque de diviser et d’indisposer tout le monde, pourquoi ne pas avoir le courage de proposer une réforme de « bon sens » (terme à la mode) qui facilitera d’autant plus le passage, dans un deuxième temps, vers un futur système à points (que les suédois ont cependant mis plus de 10 ans à mettre en œuvre) ? Pourquoi donner prise aux idéologies et aux radicalismes ?
Le 25 avril 2022