Economie

Sommaire :
Economie de l’offre (mai 2015)
Ma petite entreprise (août 2013)
Cher pétrole (mai 2008)
Le vin en France (oct 2004)

Economie de l’offre ?

On n’a pas fini d’opposer Kaynes à Hayek et Friedman, ou la politique de la demande à celle de l’offre. Comme si l’une devait définitivement exclure l’autre.

Tout d’abord il convient de mieux définir les termes et de parler de préférence d’économie que de politique. Car le rôle du politique devrait être plus neutre pour intervenir surtout sur le plan régulateur afin d’éviter les excès des agents économiques dont l’action déborderait le cadre de la seule « main invisible » si peu efficace.

Ceci n’empêche pas l’intervention de l’Etat : pour éviter une dérive low-cost systématique ou des situations de rente excessives (taux horaires du travail indigents, contrats « zero heures », spéculation foncière sapant l’économie réelle) ou pour faire émerger des solutions innovantes ou ne répondant pas aux contraintes de rendement des entreprises (le projet Galileo ou la mise au point de médicaments trop coûteux pour des maladies trop rares ou affectant des populations peu solvables).

Il n’en reste pas moins que la politique de l’offre semble préférable à celle de la demande, car elle évite l’inflation et favorise la production domestique et l’emploi, même si la corrélation entre production et emploi est progressivement rabotée par l’automatisation (robots) et la numérisation (caisses automatiques, traitements des relations clients-fournisseurs sur internet).

Mais la politique de l’offre, tant et si fort réclamée par les entreprises et à laquelle les partis de droite depuis longtemps, et ceux de gauche plus tardivement se sont progressivement convertis en Europe, et même récemment en France, cette politique doit se traduire dans l’économie réelle, dans la production marchande pour utiliser les termes de la comptabilité nationale.

Alors que les marges des entreprises se sont progressivement reconstituées, que l’indice CAC atteint des sommets et que les dividendes distribués ont formidablement progressé, l’investissement des entreprises reste en panne, l’innovation est à la traîne (malgré un système de crédit-innovation dont les dérives d’application ont été largement commentées) et la balance commerciale reste désespéramment négative.

Malgré une « conjonction et un alignement de planètes » idéales (prix du pétrole, niveau du dollar et taux des emprunts), seule la consommation avec +0.8% a réussi à hisser à +0.6% la croissance en France au premier trimestre 2015.

A quoi sert une croissance qui favorise l’achat de vêtements fabriqués en Asie, de voitures venant de Roumanie et Slovaquie, de smartphones made in China, de services informatiques et applications développés aux USA, de robots industriels et de voitures de luxe venant d’Allemagne ? Pour l’anecdote et la preuve par l’absurde, l’investissement refuge des grecs aisés réside désormais dans l’acquisition de BMW, Mercedes et autres Porsche ! Bel exemple !

Nous avons trop souvent regretté l’attitude timorée de nos entreprises qui préfèrent utiliser leur cash pour racheter leurs actions et booster les cours plutôt que d’investir dans des projets rentables qu’elles n’ont pas dans leurs cartons faute d’efforts de recherche et d’innovation.

De même que nous avons toujours exigé dans tous nos éditos plus d’audace de l’Europe si tiède, des pouvoirs publics si pusillanimes, nous réclamons des entreprise plus d’esprit entrepreneurial, c’est bien la moindre des choses. De l’audace et de l’offre, encore de l’offre, toujours de l’offre !

18 mai 2015

Ma petite entreprise

Il s’est créé près de 300.000 entreprises en France au premier semestre 2013, mais près de 2/3 de celles-ci sont le fait d’auto-entrepreneurs, en réponse à une croissance en berne, un chômage en hausse et des retraites en recul. Aujourd’hui les auto-entrepreneurs sont au nombre de 900.000 avec un revenu annuel moyen de moins de 6000 euros. Sur le tiers restant, seul un nouveau tiers concerne des entreprises artisanales, à majorité dans le secteur de la construction, ce qui ne permet pas la création de valeur ajoutée « exportable », dans la high-tech, la bio ou nano technologie, ou plus largement les activités innovantes. Le service, majoritaire, est plus pérenne quand il s’adresse aux entreprises plutôt qu’aux personnes.

Ce ne sont pas des raisons pour baisser les bras, et il faut continuer à favoriser la création d’entreprises, en simplifiant les procédures, en favorisant le crédit aux projets viables et créateurs d’emplois, en innovant dans la contribution aux charges sociales en s’inspirant des idées des méthodes adoptées par les autres pays de l’UE.

On voudra créer son entreprise, pour plus d’indépendance, pour profiter d’une « dent creuse » dans son secteur d’expertise, pour concurrencer des segments de marchés profitant abusivement d’une rente de situation non concurrentielle, pour se créer un « fonds de commerce » et se mettre ainsi mieux à l’abri des aléas salariaux de la conjoncture, pour favoriser la constitution d’une valorisation capitalistique de son activité plutôt que de se contenter d’un salaire uniquement, ou tout simplement pour gagner plus d’argent (1) .

Pour réussir ii importe de bien identifier son domaine d’action et d’en définir les contours et limites pour éviter de se disperser, et de mettre le tout par écrit (le « what we believe »), pour éviter les « glissades » dangereuses.

Il convient ensuite de faire passer son projet à la « paille de fer » de la concurrence et de la critique, en remettant en cause les pans trop vulnérables, en dressant une « check-list » des risques et en valorisant un scénario catastrophe.

Un business-plan et un cash-flow sur 3 ans sont alors indispensables pour évaluer la viabilité financière de son projet, estimer ses revenus futurs de façon prudente et conservatoire, valoriser tous ses coûts et investissement nécessaires. Outre l’avantage de constituer un outil de négociation avec son banquier pour obtenir un financement complémentaire, ceci sera aussi un garde-fou pour savoir s’arrêter à temps en cas de non réalisation des objectifs.

Un projet, c’est un savoir-faire (une expertise), un savoir-réaliser (une méthodologie), un savoir-vendre (un marketing efficace), d’un produit ou d’une idée qu’il faudra protéger dès le départ (brevet, marque, domaine internet). Le choix du véhicule juridique est accessoire mais important sur le plan de la fiscalité, des charges sociales et dans la perspective d’une sortie à terme ou d’une revente future (EURL, auto-entreprise, SARL, SAE, + franchise etc…).

Enfin quelles que soient les vertus de tous les éléments évoqués jusqu’ici, le vrai « nerf de la guerre » reste la commercialisation : c’est le « test par l’acide » ultime, tout échec dans ce domaine condamne irrémédiablement le projet. Ne jamais compter sur les relations familiales ou amicales (au mieux c’est du bonus, au pire c’est un moyen de tester son discours et ses arguments). Le vrai premier client, c’est le client dans « le dur », inconnu au départ, acquis à l’arraché, celui dont on pourra encadrer la commande.

Pour cela, se démarquer de ses concurrents, mettre en avant sa spécificité, écouter son prospect (ses attentes seront différentes selon sa personnalité, ses challenges, ses risques, ses ambitions), donner les bonnes réponses à chacune de ses attentes, le rassurer (« enfin quelqu’un qui me comprend ! « ) et lui donner si possible des informations sur son marché, sur sa perception par celui-ci et sur ses propres concurrents.

Soigner ses prospects : ce sont des clients en devenir. On en tiendra la liste, l’historique des contacts, on évaluera pour chacun les chances de le transformer en client et on en complétera chaque semaine le « stock », au fil des idées, des événements, des lectures, des informations croisées, en se rappelant que moins du quart des prospects deviendront des clients dans les 18 mois suivants, mais que certains pourront le devenir 3 ans plus tard.

Soigner ses clients : il vaut mieux en avoir 10 qui font 50% de son CA, qu’un seul qui en fasse 80%. Garder en permanence le contact avec ses clients est vital, les visiter selon un calendrier en relation avec leur fréquence potentielle de « faire affaire » est recommandé. Enfin se rappeler que la valorisation de son « fonds de commerce » est proportionnel au CA avec ses clients, mais inversement proportionnel à leur « nomadisme » commercial.

La France compte quelques 6000 défaillances d’entreprises par mois, soit plus de 70.000 par an ou encore plus de 10% des créations annuelles. C’est beaucoup ! Mais il en reste plus de 80% qui survivent et progressent. Une bonne raison de tenter sa chance autrement qu’en s’imaginant aller jouer au casino.

Le 1 août 2013

(1)

En effet selon la thèse de Thomas PIKKETY sur les inégalités, l’entrepreneur devenu rentier sera nettement mieux favorisé que le salarié.

Supposons un salarié aisé, mais pas parmi les mieux nantis, gagnant 150.000 € par an et pouvant mettre de côté 10% de ses revenus : au bout de 10 ans et en euros constants, il ne disposera que de 150.000 euros.

Le même se mettant à son compte et créant une entreprise qui génère dans les dernières années seulement 150.000 € de profit (après sa propre rémunération) sur la base d’un rendement net de 10% (correspondant à un CA de 1.5 M€ par an, pourra espérer revendre au bout de 10 ans son entreprise 10 fois les bénéfices, soit près de 1.5 M€, au lieu de 150.000 € d’économies pour le salarié. Placée à 5% cette somme assure une rente annuelle sans travail de 75.000 €.

Cher pétrole

La hausse récente et rapide du brut à plus de 130 $ le baril (en attendant les 200 $), alors qu’il était encore inférieur à 20 $ jusqu’en mi 1999 et n’a pas dépassé 30 $ avant 2003, provoque un « tsunami » économique mondial et fragilise socialement et politiquement nombre de pays, dont la France.

Sur la base d’une production moyenne et désormais plafonnée à 85 Mbj (millions de barils jours) cette hausse en l’espace de 5 ans apporte un complément de rente annuelle de plus de 3000 Md$ aux pays producteurs-exportateurs qui représentent 630 M d’habitants soit 10% de la population mondiale (Russie, Nigeria, Mexique et Iran inclus pour un total de 460 M) et ponctionne d’autant les pays consommateurs.

Or en mars 2008 l’économiste Joseph STIGLITZ chiffrait le coût global à ce jour de cinq années de guerre en Irak initiée en mars 2003 à (justement) 3000 Md$ soit l’équivalent d’un an de rente pétrolière. Si cette somme avait été investie en recherche dans des énergies et des moteurs propres, biens des problèmes auraient été résolus dont le moindre n’est pas celui des rejets de CO².

On ne reviendra pas sur les causes internationales et géopolitiques de cette crise (boulimie chinoise et indienne, gesticulations vénézuéliennes, insécurité nigériane, risques iranien et irakien, insuffisance des investissements russes –deuxième producteur mondial – tarissement des découvertes de gisements nouveaux, chute du dollar poussant les producteurs à rajuster leur prix pour préserver la rente pétrolière), ni sur ses conséquence planétaires (réduction de la croissance mondiale de plus de 0.5 point, hausse des prix des céréales – et de la tortilla mexicaine – poussée par une demande aberrante de biocarburants, favorisée par le lobby agricole).

En France les gesticulations gouvernementales répondent à celles des corporations (marins, taxis, transporteurs) et on rétorquera par d’hypothétiques cagnottes à des demandes de taxes flottantes, alors que le pouvoir d’achat de tout un chacun est sérieusement amputé et qu’il serait par ailleurs illusoire de laisser croire au retour d’une énergie fossile abordable face à un pic de production mondiale projeté entre 2010 et 2050.

Dans notre pays la hausse du brut a particulièrement affecté les utilisateurs de voitures diésel (60% de la flotte et 80% des ventes) aveuglés par une TIPP lourde (même si celle-ci a amorti de fait la hausse du brut) et politiquement complaisante à 43 cts le litre contre 61 cts pour l’essence, alors que le diésel est par nature industriellement plus onéreux et moins disponible, ce qui ne fait qu’en exacerber les cours (à 78 cts actuellement le litre HT contre 60 cts pour l’essence). Cet avantage fiscal quasi unique en Europe et favorisé par le lobby des constructeurs et celui des transporteurs, a retardé tout développement de solutions radicales d’économies ou de remplacement (hybrides, électrique, hydrogène).

Tandis que la marine marchande revient timidement à la voile d’appoint, que la construction développe des solutions autosuffisantes et propres à base de solaire et d’isolation, il est grand temps que le secteur des transports se remette en cause. Cependant il s’agit de solutions à moyen terme et qui ne donnent pas de réponse satisfaisante à la crise actuelle.

Le marins pêcheurs ont paradoxalement donné un début de réponse avec le carburant « euro-compatible », c’est à dire avec une taxation harmonisée au niveau européen, seule garantie d’égalité et donc d’acceptabilité possible. Cette « voie européenne » pourrait aller jusqu’à des négociations d’achats au niveau régional pour mettre notamment à profit notre avantage compétitif par l’euro.

Cela aurait au moins l’avantage de faire taire des promesses et propositions trop nationalistes sinon populistes (et donc politiquement dangereuses) dans tous les coins de l’Union.

Le 26 mai 2008

Le vin en France

La France produit quelques 55 millions d’hectolitres sur un total mondial de près de 280 millions, et représente une valeur marchande de production de 8 milliards d’Euros (soit 1.5 Euro en moyenne la bouteille de 0.75 l) employant quelques 40.000 actifs dans la filière

La production de AOC et VDQS (VQPRD) représente près de la moitié de cette production soit 25 millions d’hectolitres et constitue l’essentiel des exportations qui génèrent un CA de 5.7 milliards d’Euros pour 15.4 millions d’hectolitres en 2002 (soit un prix moyen de la bouteille à 3.70 Euros).

Par différence on peut estimer, hors importations, que chaque foyer consomme en moyenne un peu plus de 4 cartons de 12 bouteilles de vin français de qualité par an représentant une dépense annuelle d’à peine plus de 500 Euros., soit 1.4

Euro par jour et par foyer, champagne compris. A titre de comparaison la dépense annuelle et individuelle pour un téléphone portable est de plus de 300 Euros.

Cette consommation se répartit entre AOC, vins de pays, et depuis peu vins de cépage, et plus récemment encore vins de marques. En outre les vins de négociants seront immanquablement déclinés bientôt en vins de distributeurs.

Les guides qui ont fait leur réputation et leur fortune sur la diversité de l’offre existante, recensent en moyenne 10.000 châteaux et origines, qui ne représentent qu’un tiers des produits testés. Si la consommation était limitée à ces seuls

heureux élus, le chiffre d’affaires moyen par origine serait de moins de 500.000 Euros par an ce qui correspond au chiffre d’affaires d’une petite librairie parisienne. Ou encore le producteur aurait une chance sur 1250 de vendre un carton de 6 bouteilles à un foyer français.

Que dire de la perplexité du consommateur-amateur moyen pour se retrouver parmi les 10.000 appellations les plus réputées et qui même en 30 ans au rythme d’une dégustation par jour ne pourrait faire le tour de problème !

Il est certes nécessaire de défendre la qualité et les originalités des vins français, mais une telle dispersion est catastrophique sur le plan national et irrémédiablement suicidaire sur le plan international.

Si l’on tient compte des 10 principales régions productrices, chacune divisible en 10 classifications et 5 niveaux, on obtiendrait 500 appellations de base (nombre déjà supérieur à celui des fromages et des jours de l’année) avec des

qualités homogènes et constantes, le terroir ou « château » apportant en complément la signature de l’exploitant, qui s’engagerait ainsi personnellement vis à vis du consommateur.

Enfin, et pour mémoire, que dire des prix des vins en restaurant où un coefficient de 3 à 5 est appliqué, avec comme fausse justification, les prétendues contraintes fiscales, alors que la plupart des restaurants sont imposés au réel. En

réponse les clients se réfugient lâchement derrière la lutte contre l’alcoolisme au volant pour ne pas avouer vouloir refuser l’invité supplémentaire que représente le prix d’une bouteille de vin.

On pourra également favoriser, au-delà de la vente au verre déjà assez bien établie, les bouteilles de 50cl plus adaptées à une consommation raisonnable en couple que la bouteille de 0.75.

Le 5 octobre 2004

Sources chiffrées : www.onivins.fr